mercredi 1 août 2012

Neolibéralisme

L’incroyable hold-up bancaire en Europe, nouvel assaut

Ce billet est une note envoyée à des milliers de kilomètres de l'Europe, opinion mesurée à chaud des conneries qu'on peut lire dans la presse numérique en permanence. Alors il paraît que ça va mal en Europe, de l'Espagne à la Grèce en passant par la France, l'Allemagne et le Benelux (Pays-Bas, Luxembourg, Belgique) ? Ah oui, j'oubliais. La crise ! Diantre ! Crise de la Dette, crise de l'euro, crise du bon sens, crise de la raison, crise d'épilepsie à force d'avoir les yeux rivés sur les écrans boursiers ! Ah ! Les courtiers attaquent leurs propres pays. Sont-ils devenus fous ? Pas du tout ! C'est l'histoire du plus grand hold-up de l'Histoire de l'Europe. Nous sommes en 2012, bienvenue dans le monde merveilleux du néolibéralisme avancé où les marchands se disent démocrates.

-L'Europe du nord dans le collimateur des charognards

Je ris jaune. Il y a trois ans, A. Merkel et N. Sarkozy s'appliquaient à dire que la dette publique grecque était due à une mauvaise gestion de l'économie et qu'en gros, cela n'arriverait pas dans leurs latitudes. Que les mesures d'austérité à Athènes résorberaient le gonflement de cette dette. En tant que bons pantins porte-paroles des grandes banques d'affaires, neufs plans de rigueur furent imposés au peuple grec en représailles de fonds alloués au gouvernement. Ces "plans" successifs n'ont eu pour conséquence que d'aggraver l'économie et la situation sociale de la population est pire qu'avant le premier prêt. Les milliards d'euros dits "d'aide" ont transité des banques vers la BCE, pour revenir au final aux banques privées, qui ont rachetés les titres de la dette. L'Etat grec et son peuple ont été pillés comme jamais.

Et en ce début Août, je vois que la guerre économique frappe maintenant l'Allemagne et le Benelux à son tour. Alors que la presse française saute du tour de France aux JO de Londres, je lis entre deux fais divers que les agences de notation (Moody's et S&P's) viennent de placer l'Allemagne, les Pays-Bas et le Luxembourg sous "surveillance négative". Vous savez, le fameux passage du "triple A" au "A+" ou je ne sais quoi, qui fait augmenter les taux d'emprunts d'un pays sur les marchés financiers. Autrement dit, quelques banquiers s'arrogent le droit de dégrader les conditions d'emprunts de trois Etats riches s'ils ne prennent pas de mesures pour résorber leur dette publique. J'ai déjà vu ça quelque part... Ceux-ci font quand-même partie des plus riches de la planète. Le coup d'Etat de la finance bancaire sur les Nations européennes poursuit son cours.

Moi qui suis un peu crédule, je n'ai pas fait mes classes à l'ENA, je me questionne : comment est-il possible qu'une agence bancaire puisse "noter" ou sanctionner un Etat-Nation ? Moi qui pensais que l'Etat était une entité juridique légitime dans son autorité suprême, me voilà brouillé ! Pourquoi les gouvernements de l'Union Européenne seraient-ils mis sous surveillance par des banquiers ? Ils ont le pouvoir politique, la légitimité pour créer des lois de sauvegarde des intérêts publics, n'est-ce pas ? Ah mais oui ! L'Etat n'est plus souverain sur la création monétaire, et il est interdit pour la Banque Centrale Européenne de prêter directement à un Etat membre. Comme ce mécanisme est proscrit par le droit européen, les Etats membres empruntent auprès des banques privées, qui elles, sont des entreprises d'investissement, d'affaires. Du coup, l'Etat fait un emprunt à 17% pour rembourser ses dettes antérieures, et creuse encore plus sa dette publique lorsqu'il multiplie les emprunts. Mais la plupart des dettes publiques sont d'anciennes créances privées pourries rachetées par les Etats pour "sauver" les banques. Et les gouvernements fantoches refusent de faire payer leurs bailleurs de fonds. Le chat se mord la queue juste pour éviter de se voir dans le miroir. Stupidité de cette économie de crédit qund tu nous tiens ! Cela évite de demander aux multinationales et aux riches de payer leurs impôts, d'interdire l'évasion fiscale tout en faisant reposer le pillage général d'un continent sur son peuple.

- Une série de putschs prémédités, élites contre peuples.

Lorsque les banques d'investissement menaçaient de faire faillite en 2008, les Etats ont racheté les créances pourries, renfloué les banques, ce qui a creusé à plus de 50% la dette publique. En 2010-2011, les créanciers étrangers de la zone euro se sont mis à spéculer sur les titres de monnaie auprès des marchés sans que les gouvernements néolibéraux ne réagissent. L'année suivante, les banques qui prospèrent maintenant "demandent" aux gouvernements que les Etats remboursent leurs dettes publiques. Mais faudrait-il rappeler encore que cette dette est issue des rachats de créances privées, que les banques n'ont pas eu à rembourser un seul euro des fonds publics accordés, nommés plan d'aide ? Quelle folie. Fin 2011, trois barons de la puissante Goldman Sachs s'assoient sur le trône du pouvoir en Italie (Mario Monti), en Grèce (Lucas Papadimos) et à la BCE (Mario Draghi), renversent ainsi deux gouvernements et le directoire de la BCE sans aucune élection ni référendum populaire. Début 2012, je me souviens avant de quitter la France, que le président français heureusement déchu impliquait le pays dans un "mécanisme européen de stabilité", sorte de FMI qui contraindrait la France à n'avoir pour politique économique que la rigueur (ou plus médiatiquement l'austérité). Son remplaçant F. Hollande reproduira la même ligne néolibérale de fusion des compétences au profit des rentiers pour la simple raison que ce n'est pas lui qui décide. Six mois plus tard, alors que l'été assèche l'Europe, la presse maintient les lecteurs dans la peur en martelant que la Grèce pourrait sortir de l'euro. Ah ! Stupeur au CAC40 ! Mais pensons un peu, cela ne fait pas de mal je vous assure : rien dans les traités européens ne précise ni n'impose des conditions de sortie de l'euro d'un pays membre. Il y a des conditions d'entrée, pas de sortie. Si la Grèce ou n'importe quel autre Etat doit sortir de la zone euro, c'est le gouvernement concerné qui en fait le choix, pas les autres.

-TINA : There is no alternative. Vraiment ?

On entend souvent dire de la part du Pouvoir qu'il n'a pas le choix. Du style "se serrer la ceinture (pour le peuple) est la seule solution et croyez-moi, il n'y a pas d'autres alternatives". Cela vient tout droit de M. Thatcher, et des néolibéraux de l'école de Chicago. Ces théoriciens partisans de la doctrine du choc économique font croire qu'il n'y a pas d'autres choix que de privatiser, de déréguler les transactions, pourquoi pas d'abolir les droits sociaux, faire la "guerre pour la paix", etc. Bref. A chaque fois que le Pouvoir impose une régression qui garrote les droits sociaux, il est bien entendu primordial de faire passer la piqûre pour bonne. Le Pouvoir se fait passer pour bien veillant, et cela marche. Car les journalistes non-censurés reproduisent toujours une idéologie concordante à l'ordre dominant, au même format pour tous.

Il y avait pourtant des solutions populaires pour éviter tout ce vacarme d'austérité, de crise de la dette et de mise à mort lente par saignement du peuple. En France, en Allemagne et en Grèce, aux élections de 2012, voter pour des candidats se proposant de faire un audit citoyen pour répudier la partie odieuse de la dette publique, par exemple. Rien que la France, dans son histoire, a répudié sa dette publique à plusieurs reprises pour se maintenir. Par exemple, lassé des gaspillages de son intendant Nicolas Fouquet, Louis XIV répudie la dette et évince son intendant en le remplaçant par Colbert.

Deuxièmement : nationaliser les banques pour remettre le crédit au service du peuple, aurait pu être une solution. L'Islande a tenté de le faire fin 2010 en rédigeant une Assemblée Constituante, répudiant la dette illégitime et nationalisant les deux grandes banques du pays.

Troisièmement : supprimer les mécanismes de défiscalisation des hauts revenus en réinstaurant des barèmes de l'impôt sur le revenus et sur les sociétés. Instaurer un salaire maximal de 300 000 €/an au dessus duquel l'Etat taxe à 100% les bénéfices afin que les plus riches payent aussi de leur poche l'effort économique du pays.

Les solutions ne manquent pas et sans priver personne, au contraire. Mais les entreprises de relations publiques (ou propagande), qui sont proches du pouvoir et du Capital, préférèrent galvaniser la haine et l'extrême-droite plutôt que d'informer les électeurs. La vraie gauche une fois coulée en Europe, il ne restait plus qu'à placer les néolibéraux de "gauche" au pouvoir, du moins en France, à un moment où le Front de Gauche commençait à bénéficier d'une aura populaire importante. C'est profitable aux rentes, aux profits des entreprises, aux marchés financiers, à la Bourse.

Il n'y a pas eu d'élection en Europe, les chefs d'Etat qui sont "élus" sont en réalité placés au pouvoir par les élites, qui réalisent un achat de la paix sociale en donnant l'impression d'un changement politique pour renforcer le pouvoir économique des banquiers sur l'UE. Demandez à une souris de croire que le chat ne lui fera aucun mal, vous croirez alors à la Démocratie et aux élections. La République au sens des philosophes du 19ème siècle est morte il y a bien longtemps, mais déjà Aristote en son temps vivant avait raison : la démocratie chavire souvent au service des tyrans en ploutocratie, le pouvoir de l'argent dans les poches de quelques uns. Nous y sommes à nouveau.

-La prochaine décennie sera insurrectionnelle.

Ce que l'on nomme crise est une guerre du Capital déclarée aux masses prises en otage par leurs gouvernements scélérats. Les élections qui donnent un semblant de démocratie accréditent l'Empire bancaire et garrotent le peuple. Et comme les fusibles de la conscience ont été éteints par l'école et les médias, la guerre est gagnée d'avance. L'école confirme les hiérarchies pour que les chefs restent des chefs, les médias n'offrent qu'une seule vision et censurent le reste. Belle démocratie d'opinion... Au final, les mêmes chefs formés aux grandes écoles sont les plus gros consommateurs de médias et sont plus endoctrinés que la "masse" dominée : élites, journalistes et Hommes de pouvoir vont alors main dans la main, le vase est clos.

Mais il y a de plus en plus de brebis déroutées qui ont compris que l'argent de ce monde de charognes n'était qu'une spéculation sur des dettes, que 80% de la masse monétaire est numérique et qu'elle ne repose que sur du fictif. Que nous vivons dans une économie de casino qui transforme le monde en camp de concentration géant au profit d'une poignée de gros propriétaires. Si les écrans s'éteignent, il n'y a plus d'économie. A un tel stade d'avancée technologique, comment a-t-on pu faire au 21ème siècle pour dépendre à ce point de l'électricité et du numérique ? La réponse est simple : l'Humanité a profondément régressé. Au nom du Progrès, elle a perdu sa réflexion globale, et est devenue l'esclave de ses propres technologies.

Le plus grand mal de ces Temps est que les gens croient vivre en démocratie. Nous avons encore des libertés, beaucoup plus qu'il y a un siècle. Mais c'est cela qui tue la résistance : l'impression d'être libre. Un certain Félix Leclerc chantait "ventre plein n'a pas de rage".

Lors, en Occident on descend dans la rue clamer son mépris, mais gentiment. Les manières légales de manifester (manifestation, vote, pétitions) sont légales parce qu'elles ne sont pas dangereuses pour le Pouvoir. Ce n'est qu'une question d'années. La colère monte de Québec à Mexico, d'Athènes à Madrid, en Afrique, en Asie, les causes s'unifient et se mondialisent aussi vite que les capitaux. Les banques pourront détenir l'Europe et imposer un Nouvel Ordre Mondial régi par un seul et même gouvernement nommé Goldman Sachs ou je ne sais quoi. Mais un jour, les marchands et les banquiers ne pourront plus contenir la colère des gens devenus insurgés. Comme d'habitude hélas, ce seront les gens les plus pauvres qui paieront le prix fort, qui laisseront leur vie sous les balles policières. Mais chaque Empire subit sa chute parfois aussi vite qu'il connaît l'apothéose, l'apogée. Ainsi, viendra le temps de la Révolution sociale.

Samuel Moleaud.


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